L'auto-compassion

Par Tina Montreuil, professeure adjointe au département de psychologie de l'éducation et du counseling de l'Université McGill29 Avril 2020

Dans cet article, nous allons explorer l’importance de normaliser la présence de problèmes et la présence d’adversité comme il en est le cas pour COVID-19. Nous nous retrouvons tous devant un problème ou de l’adversité à un moment donné. Ainsi, il est très important de ne pas catastrophiser la présence de problèmes.

Au lieu, il est préférable d’entretenir une attitude d’acceptation, qui encourage la capacité à penser de manière plus rationnelle et de réduire la détresse associée à une perspective plus catastrophique. Il faut également s’exercer à augmenter votre capacité à être auto-compatissant envers vous-même.

Nous discuterons de la notion de pensées bénéfiques entourant le rôle de parent et mettrons en pratique des moyens pour réagir aux pensées nuisibles. Les pensées de compassion envers soi-même et les autres sont en fait des pensées bénéfiques.

Il est tout à fait normal d’être confronté à un ou des problèmes.

Le fait qu’un problème imprévu surgisse ne signifie pas que vous êtes voués à l’échec, que vous êtes de moindre valeur, ni qu’il y a quelque chose d’anormal avec vous en tant qu’individu. Votre perception (type de pensées) de cet événement fâcheux, qu’elle soit normalisante (« Ça ira ») ou catastrophisante (« Ça y est, je suis foutue »), affectera votre réaction, vos moyens face à ce problème.

Ce qui importe, ce n’est pas le fait que vous vous retrouviez face à un problème, c’est de porter attention à la manière dont vous réagissez (adaptée ou mésadaptée) à la venue d’une telle situation.

Imaginons un instant qu’il neige (= problème perçu). La difficulté réelle se pose dans la manière dont vous réagissez à l’arrivée de la neige. Une réponse mésadaptée serait de ne pas être bien préparé pour y faire face (= le port du short et de sandales).

Auto-compassion et acceptation

Implications sur les pensées et les émotions

Il serait bien évidemment souhaitable que la vie se déroule toujours de manière prévisible, favorable et positive. Toutefois, notre quotidien est parfois interrompu par des événements imprévus qui nous déstabilisent.

Lorsque la vie donne lieu à ces événements, en dépit d’efforts, une réponse adaptée nécessite parfois de l’acceptation.

Lorsque vous êtes confrontée à la déception, à la perte ou à la souffrance, vous pouvez trouver là une opportunité d’APPRENDRE à vous traiter avec compassion et bonté.

Vous pouvez vous attribuer le droit à l’erreur, en vous offrant vous-même un soutien émotionnel, comme vous le feriez pour un ami proche ou un membre de votre famille qui souffre.

L’AUTO-COMPASSION ne consiste pas à vous dire que vous êtes meilleur que les autres ou de vous donner des excuses. Il s’agit de faire preuve d’ACCEPTATION envers soi et face à la réalité ou l’adversité à laquelle vous êtes confronté.

Le raisonnement émotionnel est un processus cognitif à travers lequel vous donnez forme à une idée ou à une croyance, en fonction de la façon dont vous vous sentez.

Par exemple, si la pensée nuisible suivante vous vient à l’esprit « Je suis un mauvais parent », cette pensée engendra des sentiments d’impuissance, de tristesse et de dévalorisation. Conséquemment, ces émotions auront comme effet de vous démotiver, de renforcer l’isolement, d’affecter négativement la capacité de favoriser un lien d’attachement avec votre enfant / adolescent - en quelque sorte entraînant des comportements souvent associés au fait d’ « être un mauvais parent ».

Ce qui est contraignant de cette forme de pensées nuisibles, c’est qu’elles affectent notre humeur et nous reconduisent vers l’actualisation de cette croyance ou illusion.

Exercez-vous à la pensée auto-compatissante

Les énoncés ci-dessous comportent des pensées automatiques nuisibles et mésadaptées. Exercez-vous à les reformuler avec une voix auto-compatissante.

Pensée nuisible :

« Récemment je semble manifester des réactions émotionnelles plus colériques envers mon enfant. Je vais nuire à son bien-être. »

Pensée auto-compatissante :

« Il n’est pas facile de garder son calme durant une période plus stressante comme en COVID-19. L’important, c’est que j’en suis conscient et je tente de mieux réagir. »

« Mon enfant est résilient et nous partageons également des moments privilégiés ensemble. »

Quelques stratégies pour vous aider

Temps limité

Il est parfois nécessaire de penser aux choses qui affectent négativement notre humeur, mais il est également essentiel de ne pas y consacrer trop d’énergie. En ce sens, vous pouvez décider de limiter à 5 ou 10 minutes par jour le temps consacré à ces pensées nuisibles. Il est bien de s’efforcer à ne pas le faire en présence des enfants.

Projection dans le temps

Parfois, lorsque nous sommes stressés ou tristes, nous avons l’impression que la situation est stressante et terrible et qu’elle le demeurera pour toujours. Quand ce processus de pensées se manifeste, il est utile de prendre un moment pour se projeter dans un futur où les choses s’améliorent.

L’autoapprentissage

Lorsque nous sommes confrontés à une situation nouvelle, comme en temps de COVID-19, vous avez été encouragé à faire preuve d’auto-compassion envers vous-même. Toutefois, si nous n’avons pas l’habitude de nourrir des pensées bénéfiques et qu’au contraire nous avons plutôt recours aux pensées nuisibles, s’accorder un temps d’autoapprentissage est souhaité. Comme pour toute chose nouvelle, on s’améliore avec la pratique et la persévérance